28/10/2004

La copie privée reprend du poil de la bête

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

Les faits : un internaute avait téléchargé sur le net des films et reproduit ceux-ci sur CD-Rom, en plus de la copie de disques prêtés par des amis. Au total 488 galettes quand même ! Son objectif était de se les regarder tranquillement ou entre potes. Il n’avait ni vendu, ni diffusé ou échangé sur un quelconque réseau, notamment P2P, et donc limité ces vidéos à un strict usage privé.
C’est ce qu’à reconnu le Tribunal Correctionnel en soulignant que “l’auteur ne peut interdire les copies ou reproductions strictement réservés à l’usage privé du copiste“. Rien ne pouvait donc lui être reproché.
C’est d’autant plus vrai qu’en gravant sur CD lesdits films, l’intéressé avait acquitté les droits collectifs via la taxe sur les supports vierges.
La décision du Tribunal Correctionnel de Rodez suit elle-même des décisions hollandaises, canadiennes ou américaines qui disent simplement que le téléchargement est légal, c’est la diffusion hors de la sphère privée qui ne l’est pas !

Voilà qui ne va manquer de relancer le débat sur une copie privée mise à mal par les décisions récentes sur les dispositifs anti-copie ou plus sûrement sur le projet de taxe ou licence légale sur les forfaits des fournisseurs d’accès, défendu par de nombreuses organisations, y compris des sociétés d’auteurs comme l’ADAMI. En effet, s’il faut légitimement que les auteurs s’y retrouvent, il faut certes lutter contre le piratage, mais aussi percevoir des droits.
La taxe sur les supports vierges concerne les CD et DVD vierges, mais aussi les disques-durs. Il est très tentant d’instaurer un péage sur les abonnements et cela ne pose aucun problème technique : il suffit d’étendre le champ de perception qui s’applique déjà au support vierge, depuis 1985, à l’ère de la bonne vielle k7. Les mécanismes de perception et de reversion sont tout à fait rodés et incluent l’alimentation de fonds d’aides à la création, tel le FCM, ou à la formation.
S’il faut taxer l’usage, il est à mon avis plus juste de taxer l’abonnement que le support, mais il y a plusieurs problèmes :

- dans la guerre des prix actuels sur les forfaits ADSL, les FAI feront la gueule. D’autant plus qu’avec des forfaits triple-play [41], il faudrait ne taxer que la part haut-débit, décortiquant donc le modèle économique au profit d’une certaine clarté des prix et services pas toujours souhaitée par tout le monde…

- les détracteurs de ce genre de taxe y voient une forme de légitimité à Kazaa et assimilés. Le téléchargement est légal, mais la diffusion ne l’est pas, c’est évidemment là que le modèle d’échange P2P perd son intérêt.

- la cohabitation avec les plateformes légales qui ne manqueraient pas d’y voir au minimum un manque de soutient à leur développement…

- finissons sur les modèles comme Weed qui complexifient encore un peu plus le modèle trop simple que nos chers députés avaient réussi à établir.

Je ne sais pas vous, mais je crois en effet que les débats sont loin d’être clos et qu’un retour au parlement ne devrait pas tarder à repointer le bout de son nez…

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